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  • Photo du rédacteurL'Article Dix-Neuf

Inscape

Par Gabrièle Dubé-Roy

« Ce texte a été rédigé en écoutant l’album Inscape d’Alexandra Stréliski, pianiste montréalaise. Les titres des chansons composant l’album se retrouve dans le texte et ont guidé le fil de l’histoire. L’album porte le nom Inscape puisqu’au fil des mélodies, on se sent plongé dans notre for intérieur, dans une forme d’introspection. J’ai trouvé que le thème Virage s’arrimait bien avec ces compositions qui touchent le cœur et l’âme et qui nous transportent à travers différentes émotions. Je suggère l’écoute de quelques titres de l’album lors de la lecture de ce texte pour une expérience optimale. Je suggère aussi l’écoute de cet album pour toute personne désirant une trame sonore au film de leur vie ».


Tous les soirs, Alice contemple les guirlandes de lumières fixées à son plafond. Ça lui rappelle une nuée d’étoiles. Tous les soirs, Alice met des heures à s’endormir. Elle réfléchit. Trop. Toujours trop.


Il est 8h17 quand Alice ouvre les yeux en ce mercredi de février. Elle est en retard, comme d’habitude. En prenant les premiers vêtements qu’elle a sous la main, Alice se répète encore une fois qu’elle devrait vraiment commencer à se coucher plus tôt.


Il est 8h32 quand Alice attrape l’autobus qui l’amènera au boulot. Elle s’assoit, essoufflée. Elle regarde défiler les bâtisses, les voitures, les piétons. Elle observe ce paysage monochrome à travers la fenêtre tapissée de poussière brune de février, comme à tous les matins. The quiet voice dans sa tête lui répète qu’il y a mieux que cette routine monotone, que ce tableau terne et triste. C’est cette même voix qui l’empêche de dormir le soir. Et c’est cette même voix qu’Alice met en sourdine lorsqu’elle prend trop de place, faute de réponses aux questions qu’elle lui pose.

Il est 9h14 quand Alice franchit finalement la porte de l’immeuble où elle travaille. Elle dépose son sac et se dirige vers le bureau de Théo, comme à tous les matins. S’il y bien quelqu’un qui peut apaiser sa mélancolie, c’est Théo. Le nœud qu’elle a dans l’estomac se dénoue peu à peu quand elle regarde par la fenêtre de Théo et qu’elle l’écoute parler d’une oreille distraite. C’est là où elle peut se permettre de rêver au film de sa vie. Là où elle peut s’imaginer que, comme au cinéma, sa vie fait une ellipse. Qu’elle prend un raccourci pour en arriver là où Alice aura enfin complété sa quête du bonheur.


N’est-ce pas ce que tout le monde recherche au fond; le bonheur? N’est-ce pas le but ultime d’une vie? Mais comment faire pour l’atteindre? Ce sont les questions qui se bousculent le plus souvent dans la tête d’Alice. Tous les jours depuis quelques années, elle attend que les réponses à ces questions viennent à elle. Elle attend d’être emportée par les changing winds qui la mèneront vers ce bonheur qui semble inatteignable.


Elle était heureuse Alice avant pourtant. Quand elle n’avait pas encore de responsabilités, de décisions à prendre, de remises en question. Quand elle en savait moins sur les rouages de la vie. Pour tenter de se consoler, Alice se dit qu’il ne s’agit que d’un interlude dans son cheminement. Que ce sentiment d’incertitude, de doute n’est qu’une transition entre l’ignorance et la découverte du sens de sa vie.


Il est 17h46 quand Alice décide de rentrer chez elle à pied. Il fait bon pour un soir de février. Elle se dit que la brise d’hiver réussira peut-être à vider son esprit chargé. Elle met ses écouteurs dans ses oreilles et ouvre son application de musique. Elle voit que Théo lui a fait une suggestion musicale : Inscape. Elle fait jouer l’album. Il n’a fallu que quelques notes de piano pour que les larmes se mettent à couler de manière irrépressible sur les joues d’Alice. C’est comme si les mélodies étaient parvenues à explorer le fond de son être et avaient levé le voile de sa blind vision.


C’est à ce moment qu’Alice a compris. Elle a compris qu’elle devait vivre dans le moment présent. Elle a compris qu’elle devait trouver les réponses à ses questions et ne pas attendre que celles-ci se présentent à elle miraculeusement. Elle a compris que le bonheur est un moyen de vivre sa vie, et non une fin. Elle a compris qu’elle devait vivre.

Alice est partie. Une burnout fugue, c’est ce que tout le monde dit. Mais Théo le sait lui qu’Alice n’est pas en fugue. Il sait qu’elle ne fuit pas, mais plutôt qu’elle affronte. Qu’elle affronte ses questionnements intérieurs, qu’elle apprend à se découvrir, à se comprendre. Théo sait qu’elle avait besoin de cet overturn, de cette introspection. Il sait aussi que ce n’est pas pour toujours. Il attendra.


Il est 22h38. Alice pense à Théo. Ça lui arrive de laisser ses pensées s’évader vers lui parfois. Après tout c’est grâce à lui si elle a ouvert les yeux, si elle a compris que les réponses à ses questions se trouvaient en son for intérieur. Mais quand revient le jour, Alice repart en quête. Parce que pour découvrir ces réponses, elle doit se découvrir elle-même. Découvrir ce qu’elle aime, ce qui la fait sentir en vie, comblée et accomplie.

Tous les soirs, Alice contemple les étoiles, les vraies. Ça lui rappelle les lumières au plafond de son 4 ½. Tous les soirs, Alice s’endort satisfaite du virage qu’a pris sa vie grâce à ce nouveau départ. Parce que maintenant, elle vit.




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